Au jour le jour
Le 33e congrès du SCFP-Québec – 16 au 19 mai 2023

La face cachée de l’immigration

Jeudi avant-midi, les congressistes ont eu l’occasion d’entendre Sonia Djelidi, militante de longue date pour les droits de la personne. Elle a présenté son documentaire Essentiels, qui porte sur la face cachée de l’immigration au Québec. Elle a commencé par nous rappeler l’histoire de
Marcelin François, un demandeur d’asile haïtien qui travaillait la semaine dans une usine et la fin de semaine dans un CHSLD comme préposé aux bénéficiaires, et qui est décédé sans réussir à obtenir la régularisation de son statut.

L’histoire de Marcelin François est celle de beaucoup d’autres, nous dit-elle. Son travail d’enquête porte sur ces travailleuses et travailleurs immigrants qui sont présents dans les CHSLD ou les résidences pour aînés, en agriculture, dans les entrepôts de chaines pharmaceutiques, dans des abattoirs ou des usines de saucisses à hot-dog, pour ne nommer que ces exemples.

Le documentaire parle donc des conditions dans lesquelles ces personnes travaillent et vivent. On nous raconte que plusieurs ont des permis de travail fermés, soit des permis de travail qui lient une personne à un seul employeur et aucun autre. Cela empêche les détenteurs du permis de quitter leur emploi s’ils sont insatisfaits ou exploités, à moins d’accepter de retourner dans leur pays d’origine. Ces contrats de travail dits temporaires sont pourtant de plus en plus longs, pouvant parfois durer un ou deux ans et être renouvelés par la suite. Sonia Djelidi nous parle d’une sous-catégorie de travailleurs qui occupent des emplois dont plus personne ne veut au Québec, dans des conditions de travail que personne ne tolérerait.

La conférencière s’attarde au double discours du gouvernement Legault, mais également au double discours qui est présent dans l’espace public et médiatique concernant l’immigration au Québec. Beaucoup de demandeurs d’asile ont travaillé dans les CHSLD pendant la pandémie via les agences de placement privées, nous dit-elle, mais dans le discours public, on diabolisait l’immigration en parlant de la nécessité de réduire le nombre d’immigrants. En réalité, bien qu’on nous parle d’une cible gouvernementale de 50 000 personnes immigrantes chaque année, on parle en réalité de 50 000 personnes résidentes permanentes. Or, ce sont 195 000 personnes de l’étranger qui travaillent au Québec avec des permis, donc trois fois plus de personnes que la cible qui ont des visas de travail temporaires et dont on ne parle pas. Voilà l’angle mort sur le débat sur l’immigration au Québec, selon elle.

La documentariste a terminé sa présentation en rappelant l’importance de passer de l’indignation à l’action en nommant des pistes de solution telles que l’abolition des permis de travail fermés, une voie d’accès à la résidence permanente pour tous et toutes et la régularisation de toutes les personnes au Canada qui vivent et travaillent déjà ici. Elle a également invité les syndicats à faire preuve de force, de courage et d’humilité en se questionnant sur leurs propres angles morts concernant les enjeux touchant le racisme et l’immigration au Québec.

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